Écrire un roman – Structurer son intrigue, partie 1

Un récit a trois noyaux : les personnages, l'univers et l'intrigue. On vous propose aujourd'hui d'en étudier la répartition classique... et ses limites !
Mathieu Begot
Mathieu Begot
Salut, moi c’est Mathieu ! Je suis passionné par les genres de l’imaginaire, la culture japonaise, mon chien et les commentaires que vous laissez sous mes articles ! En lire plus

Écrire un roman – Structurer son intrigue, partie 1

Un récit a trois noyaux : les personnages, l'univers et l'intrigue. On vous propose aujourd'hui d'en étudier la répartition classique... et ses limites !

Écrire un roman – Structurer son intrigue, partie 1

Un récit a trois noyaux : les personnages, l'univers et l'intrigue. On vous propose aujourd'hui d'en étudier la répartition classique... et ses limites !

Un récit, quelle que soit sa forme, a plusieurs éléments constitutifs. Jusque-là, tout va bien. Parmi ces éléments on trouve par exemple l’univers (le cadre du récit), les personnages, le propos (ce que l’on essaye de transmettre au lecteur à travers ce récit) et bien évidemment… L’intrigue.

Et quel morceau que l’intrigue ! C’est elle, après tout, qui met en branle les protagonistes et tient le lecteur (avec notamment ce fameux « Oh ptn ! Oh ptn ! Oh ptn ! » à 3h du matin qui vous fait tourner la page et réaliser que vous n’allez pas ou peu dormir cette nuit).
Une bonne intrigue a la force de pouvoir vous faire lire un livre que vous ne trouvez pas bien écrit (au niveau purement textuel, j’entends) ou d’un genre qui vous débecte.
Partant de là, je pense que travailler ses intrigues (et ce quel que soit votre profil, je vous vois les jardiniers) ne peut que permettre de proposer un récit plus fort, plus profond et donc plus capable de plaire à un lecteur.
Ce que je vous propose, c’est de nous intéresser en profondeur à la notion d’intrigue. Pour cela, nous nous intéresserons au découpage « classique » d’une intrigue (celui en cinq parties que l’on trouve un peu partout) et nous essayerons de voir en quoi il est fonctionnel, mais finalement pas suffisant pour réellement travailler.
Nous nous intéresserons ensuite à la méthode de « narration organique » proposée par John Truby qui sera un superbe outil pour compléter ce que nous allons voir aujourd’hui !
M’enfin, d’ici là, commençons par le commencement :

C'est quoi une intrigue ?

L’intrigue, c’est (selon le CNRTL) une « combinaison de circonstances et d’incidents, enchaînement d’évènements qui forment le nœud de l’action ». Concrètement, l’intrigue, c’est tout ce qui advient dans votre récit. Le voyage (spatio-)temporel que vous allez faire vivre à votre lecteur et à vos protagonistes, de la situation initiale à la situation finale. Ni plus, ni moins.
Sauf que voilà, l’intrigue commence en réalité avant le début du livre. Les protagonistes y sont jetés à partir de l’élément déclencheur (on en parle plus loin, rassurez-vous), mais elle existe déjà. Ils n’ont tout simplement pas encore conscience de son existence ni du rôle qu’ils ont à y jouer.
Cet instant du récit, durant lequel les protagonistes ne connaissent pas l’intrigue, s’appelle la situation initiale, et il s’agit de la première partie de tout récit.

1re partie : La situation initiale.

La situation initiale, c’est le début chronologique de votre récit. Les protagonistes sont alors dans une situation stable et, au vu de ce qui suivra, généralement confortable.

Deux choses sont à noter ici :
1 – Si je parle de début « chronologique », c’est parce que certaines structures feront débuter le livre en plein milieu des péripéties et joueront de flash-back et conversations pour donner au lecteur la situation initiale du récit. C’est par exemple le cas si l’on ouvre le récit sur un personnage jeté en prison qui va raconter à ses codétenus ce qui lui est arrivé.
2 – La stabilité évoquée ici n’est pas une stabilité financière, morale ou sentimentale, mais une stabilité d’état pour vos protagonistes.
Votre protagoniste peut ainsi tout à fait être un vaillant monsieur toulmonde (A) qui sera jeté dans les griffes d’une secte, une étudiante brillante (B) se révélant être la réincarnation d’une impératrice déchue, ou même un banal SDF (C) qui vivra une magnifique ascension sociale avant d’être renvoyé à la rue par des corporations avides de pouvoir.
Ce qui compte ici, et c’est le point commun entre nos personnages A, B et C, c’est une stabilité dans l’état des protagonistes (les trois pourraient d’ailleurs tout à fait être dans un même récit) :

 

A est un homme banal, sans histoire, adepte du métro-boulot-dodo, mais ivre de retrouver un sens à sa vie, avec une voiture un peu vieille et un crédit sur le dos ;
B est une étudiante brillante cartésienne ayant toujours surfé sur le monde scolaire et n’ayant jusqu’à lors jamais vécu de grand problème face à ses objectifs personnels (qu’elle les ait créés ou qu’on les lui ait imposés) ;
C est un SDF ayant vécu si longtemps dans la rue qu’il ne se souvient plus du sentiment que procure le fait d’avoir un toit et qui connaît toutes les astuces de la ville pour survivre tant à la cruauté de la rue qu’à celle des hommes.

 

Tous trois vivent au sein d’un microcosme stable, qu’ils ont plus ou moins construit par eux-mêmes et qu’ils considèrent comme « leur monde ».
À cet instant du récit, on peut dire que les protagonistes n’ont pas encore entamé leur voyage, ils sont encore en attente qu’on leur mette un coup de pied au derrière (l’élément déclencheur) pour les jeter véritablement dans l’intrigue.
Ce principe est très important, parce que les protagonistes devront composer en vertu de la situation initiale que vous aurez dépeinte à votre lecteur.


Il est peu probable que notre étudiante, si elle n’est jamais sortie du milieu scolaire et est décrite comme une cartésienne pure souche, accepte immédiatement qu’elle est la réincarnation d’une impératrice dont le nom a été oublié… Et il est tout aussi peu probable que notre SDF, s’il s’est retrouvé à la rue parce qu’on s’est joué de lui par le passé, ne se méfie pas (au début du moins) de cette ascension sociale sortie de nulle part.

 

M’enfin, avant d’en arriver à ces considérations, il faut mettre un coup de pied aux fesses de nos protagonistes et les jeter dans l’intrigue. Ce coup de pied, souvent bien senti, c’est :

2ème partie : L’élément déclencheur.

L’élément déclencheur, c’est tout simplement ce qui va sortir vos protagonistes de leur situation initiale et de leur état de stabilité. Cet élément n’est d’ailleurs pas réellement une « partie » de votre intrigue à proprement parler. C’est un pivot qui va faire basculer vos protagonistes.
Il est très important de noter que l’on ne peut pas vraiment le codifier autrement que par le changement d’état qu’il amorcera chez vos protagonistes. Partant de là, et parce qu’il doit s’adapter à vos protagonistes, il est évident que les éléments déclencheurs de différents récits seront de nature et d’intensité variables

— Si A doit tomber dans une secte, alors il faut qu’il y soit amené, que ce soit par le biais d’un collègue de travail, d’une publicité visionnée dans le métro ou d’une connaissance de longue date qu’il aurait oublié jusqu’à ce qu’il la recroise. L’élément déclencheur sera ainsi ce médium qui l’invitera à une première réunion et permettra à notre cher A d’être pleinement exposé à cette idéologie inattendue, novatrice et nécessairement séductrice.
— Dans le cas de B, elle pourrait être approchée par un vieux barbu visiblement sous substances la reconnaissant comme étant « Vilisteria la Grande, fille du soleil, de la lune et des étoiles », avant de lui raconter avec une exactitude troublante le chemin de vie qu’elle a eu depuis sa naissance, chemin qu’elle aurait reproduit dans chacune de ces vies passées.
— Quant à C, il pourrait tout simplement être témoin d’un accident de voiture, faire de son mieux pour sortir des habitacles les occupants des différents véhicules, s’en aller… Et faire le buzz parce qu’un jeune l’a filmé et a diffusé le contenu sur les réseaux.

L’élément déclencheur n’est réellement qu’un pivot dans votre récit de la situation initiale vers les péripéties. Et s’il est sincèrement fondamental, puisqu’il est le début du voyage (dans la secte, dans la réalisation ou dans l’ascension sociale), il n’est pas pour autant immuable. Une même combinaison situation initiale + péripétie peut aisément être orchestrée par des éléments déclencheurs de diverses natures.

Alors bon, maintenant que l’élément déclencheur est arrivé et que les personnages ont réellement été poussés dans l’intrigue, eh bien il est temps de commencer les péripéties ! Et ça, ça se passe dans la deuxième partie de cet article !

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